Échos de l’innovation : envisager le boom actuel de l’IA au moyen des leçons tirées des accès d’enthousiasme passés

Corrado Tiralongo - 12 novembre 2025

L’intelligence artificielle demeure le récit qui définit le présent cycle de marché. Elle transforme la façon dont les sociétés affectent le capital et dont les investisseurs évaluent la croissance future. Pourtant, l’ampleur et la concentration des

Corrado Tiralongo

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L’intelligence artificielle demeure le récit qui définit le présent cycle de marché. Elle transforme la façon dont les sociétés affectent le capital et dont les investisseurs évaluent la croissance future. Pourtant, l’ampleur et la concentration des placements dans quelques sociétés technologiques américaines ont atteint des niveaux qui testent les limites financières et physiques. 

Les dépenses mondiales en infrastructures d’IA devraient dépasser les 5 000 à 7 000 milliards de dollars américains d’ici 203012, s’approchant de l’ampleur de l’expansion du réseau ferroviaire du 19e siècle. Pourtant, comme le souligne Capital Economics, les dépenses en capital actuellement liées à l’IA et affectées aux sociétés américaines de très grande envergure représentent environ 0,6 % du PIB des États-Unis (environ 140 milliards de dollars américains en données réelles)20. Même si les investissements dans l’IA ont augmenté de près de 30 % cette année et devraient encore progresser en 2026, leur empreinte macroéconomique directe demeure modeste et s’avère plus visible dans les valorisations que dans les extrants.  

Pour que ces investissements soient rentables, le monde aurait besoin d’environ 2 000 milliards de dollars américains de nouveaux revenus annuels, ce qui laisse un manque à gagner de 800 milliards de dollars américains3, même si l’on tient compte des gains de productivité prévus. Cette asymétrie, des investissements massifs avant la monétisation, caractérise un boom fragile. 

Le cadre du cycle du capital d’Edward Chancellor nous rappelle que les rendements élevés attirent les capitaux, que la concurrence les érode et que la baisse des rendements finit par rétablir la rigueur. L’essor de l’IA suit le même scénario : une véritable révolution technologique financée à un rythme et à une échelle qui pourrait surpasser les flux de trésorerie réels à court terme. 

Comme Carlota Perez l’a souligné dans Technological Revolutions and Financial Capital, chaque impulsion technologique suit un rythme connu d’installation, de frénésie et de renouvellement éventuel. Chaque phase rééquilibre finance et production, établissant les conditions pour des progrès excédentaires ou durables. 

La trajectoire de ce boom déterminera son incidence économique. S’il continue d’être financé en grande partie à même les flux de trésorerie disponibles, ses effets seront limités au secteur des technologies. S’il dépend de plus en plus des emprunts, de la location et du financement structuré, les conséquences se feront sentir dans l’ensemble de l’économie, avec des effets de deuxième et de troisième ordre sur les marchés du crédit, la disponibilité des capitaux et les réactions politiques. Capital Economics ajoute que, si les investissements dans l’IA sont financés par les bénéfices non répartis et les profits, ils pourraient graduellement relever le taux d’intérêt réel d’équilibre en stimulant la croissance potentielle. Toutefois, si l’expansion devient financée par emprunt, un endettement plus élevé pourrait resserrer les conditions financières, ce qui amplifierait la volatilité macroéconomique. 

Ce qui est différent aujourd’hui et ce qui ne l’est pas 

Les récents bénéfices des sociétés américaines de très grande envergure témoignent de leur vigueur et de leurs tensions. La croissance des revenus demeure robuste, mais les flux de trésorerie disponibles ont diminué en raison de l’accélération des dépenses en capital. Les sociétés se tournent vers la location, les instruments spécialisés et les nouveaux emprunts pour soutenir la course à l’IA1. Les analystes estiment que ces sociétés représentent maintenant 75 % des rendements de l’indice S&P 500, 80 % de la croissance des bénéfices et près de 90 % de la croissance des dépenses en capital depuis la fin de 20224. 

Les investissements mondiaux dans les infrastructures d’IA avoisinent les 400 milliards de dollars américains cette année14. D’ici 2030, les dépenses cumulatives pourraient dépasser les 5 000 à 7 000 milliards de dollars américains2. Environ 60 % de ce capital sera affecté aux semi-conducteurs et au matériel informatique, un quart aux infrastructures énergétiques et le reste à la construction et aux terrains2. Ce sont des chiffres extraordinaires pour une technologie qui en est encore aux balbutiements de l’adoption commerciale. 

La psychologie est bien connue. Dans Extraordinary Popular Delusions and the Madness of Crowds, Charles Mackay a écrit que les « gens deviennent fous collectivement, mais qu’ils retrouvent leurs sens individuellement ». Les investisseurs se trompent rarement lorsqu’ils reconnaissent le potentiel d’une idée; ils se trompent lorsqu’ils extrapolent son caractère immédiat et sa rentabilité. Kindleberger a plus tard officialisé cet état d’esprit comme la « phase d’euphorie », lorsque l’optimisme se renforce et que l’expansion du crédit soutient les valorisations au-delà des fondamentaux11. 

Comme Robert Shiller l’a souligné dans Irrational Exuberance (Exubérance irrationnelle), les booms financiers ne sont pas simplement des événements de valorisation, mais des épidémies sociales de croyance. La hausse des prix alimente les histoires, et les histoires stimulent les achats. Chaque génération invente une nouvelle justification pour expliquer pourquoi les anciennes règles de valorisation ne s’appliquent plus. En ce sens, l’IA n’est pas seulement un thème technologique, mais un récit suffisamment puissant pour influer sur les comportements de placement dans le secteur. 

Comme l’a dit le chef de la direction d’Alphabet, Sundar Pichai, l’IA est plus puissante que le feu ou l’électricité17. De telles déclarations illustrent le récit de la « nouvelle ère » que Shiller a décrit, soit la croyance que les règles de valorisation et de prudence ne s’appliquent plus face à une innovation censée transformer le monde. 

Résurgence du passé et cycle financier 

Le boom ferroviaire du 19e siècle offre l’analogie la plus claire, indispensable à l’expansion économique, mais il a financé trop de capacités trop rapidement. L’essor des télécommunications et d’Internet dans les années 1990 a suivi une tendance semblable. Plus de 500 milliards de dollars américains ont été consacrés à la mise en place de réseaux de fibre optique6. 

Les historiens financiers William Quinn et John Turner soulignent que chaque boom technologique important a ce modèle en commun6 : innovation, abondance du crédit, spéculation excessive et consolidation éventuelle. Les bulles laissent souvent derrière elles des infrastructures précieuses. La technologie réussit; la première vague d’investisseurs réussit rarement. 

Du point de vue macroéconomique, il est essentiel de faire la distinction entre les investissements nominaux et réels. Les dépenses nominales en capital pourraient exagérer l’élan lorsque la baisse des prix du matériel informatique masque la croissance réelle du volume, une dynamique que Capital Economics identifie encore aujourd’hui comme le recul des coûts informatiques. Les dépenses des sociétés semblent spectaculaires, mais l’effet macroéconomique est plus modeste, un rappel que les gains de productivité ne se matérialisent généralement qu’après une adoption généralisée. 

Capital Economics estime aussi que l’IA pourrait stimuler la croissance de la productivité de 1 à 3 points de pourcentage par année au cours des cinq prochaines années si son adoption est généralisée, ce qui pourrait constituer la plus forte accélération en 20 ans20. Pourtant, ces gains dépendent de l’efficience de l’affectation du capital et de la capacité des sociétés à traduire les promesses technologiques en extrants mesurables. 

Dans Capital Returns, Edward Chancellor explique pourquoi5. Les rendements élevés attirent les capitaux, la capacité augmente plus rapidement que la demande et les rendements futurs diminuent. Les sociétés dont la croissance de l’actif est la plus rapide ont historiquement inscrit un rendement inférieur à celui des sociétés dont les investissements sont plus rigoureux. Les leaders de l’IA entrent maintenant dans cette phase : la croissance de l’actif bondit, les flux de trésorerie disponibles diminuent et la concurrence s’intensifie, chaque société cherchant à défendre son avantage concurrentiel perçu. 

Là où la fragilité se trouve 

Bilan lourd 

Le modèle de financement du boom de l’IA passe d’un modèle autofinancé à un modèle à effet de levier. Jusqu’à récemment, les sociétés de très grande envergure pouvaient entièrement financer l’expansion à même les flux de trésorerie. Les nouvelles émissions de titres de créance et les ententes d’achat d’énergie à long terme sont maintenant monnaie courante1. 

L’affectation du capital reflète maintenant autant la conviction que la concurrence.  

Les dirigeants eux-mêmes reconnaissent ouvertement le compromis entre prudence et survie. Comme Mark Zuckerberg, chef de la direction de Meta Platforms, l’a admis : « Si nous investissons maladroitement quelques centaines de milliards de dollars, je pense que ce sera très malheureux, de toute évidence. Mais je pense que le risque est plus élevé de ne pas investir15. » 

Larry Page, cofondateur de Google/Alphabet, a été encore plus direct : « Je suis prêt à déclarer faillite plutôt que de perdre cette course 16. »  

Satya Nadella, chef de la direction de Microsoft, a abondé dans le même sens, déclarant « nous sommes dans la course pour bâtir l’infrastructure d’IA la plus puissante au monde et personne n’investira autant que nous18. » L’impulsion à dominer la concurrence, plutôt qu’à optimiser les rendements, est devenue une caractéristique de la présente phase. 

L’importance de financer le boom 

Les conséquences macroéconomiques de ce cycle-ci dépendront de la façon dont il sera financé. Pour l’instant, la plupart des sociétés de très grande envergure financent les dépenses en capital liées à l’IA à même les flux de trésorerie liés aux activités d’exploitation. Les flux de trésorerie disponibles ont diminué, mais demeurent positifs, même si le recours croissant aux baux et au financement structuré dévoile les premiers signes de levier, une dynamique de fin de cycle qui mérite notre attention. 

Si le boom demeure autofinancé, les risques demeureront limités aux valorisations boursières et aux bilans des sociétés. S’il se tourne vers les emprunts, les effets se propageront aux marchés du crédit, resserrant les conditions financières et amplifiant les risques de repli lorsque les investissements ralentiront. 

Tournant et trajectoire vers un âge d’or 

L’histoire montre que les excès d’enthousiasme financier et les booms technologiques suivent généralement une tendance reconnaissable, passant de l’enthousiasme, aux perturbations et au renouvellement éventuel. Comme Carlota Perez l’a souligné dans Technological Revolutions and Financial Capital (2002), chaque impulsion technologique majeure suit une tendance en quatre phases : installation, frénésie, tournant et déploiement.  

La phase d’installation précoce voit le lancement de technologies révolutionnaires et des infrastructures de soutien, tandis que dans la phase de frénésie a lieu une course au financement avant la production, ce qui stimule la spéculation et les investissements excessifs. Le tournant émerge lorsque les marchés et les décideurs imposent un réalignement entre le capital financier et le capital réel, et la phase de déploiement produit les avantages sociaux et de productivité durables qui définissent un « âge d’or »19. 

Le cadre de Perez donne à penser que le cycle de l’IA est passé de l’installation à la frénésie. L’essor des centres de données, des puces et des systèmes électriques s’est autorenforcé, car les sociétés rivalisent pour dominer, mais les mesures de valorisation et les structures de financement s’étendent maintenant au-delà de la rentabilité immédiate. Le prochain tournant, comme Perez l’a décrit, dépendra de la rapidité avec laquelle le financement se réalignera sur les investissements productifs, un processus façonné par les sources de financement, l’adaptation des politiques et la confiance du public. 

Capital Economics estime que la vague actuelle d’investissements dans l’IA a ajouté environ 0,2 % au PIB mondial au cours de la dernière année et qu’elle pourrait stimuler la croissance de 0,3 % à 0,5 % par année jusqu’en 2027. À plus long terme, un déploiement réussi pourrait accroître la croissance de la productivité jusqu’à 1,5 point de pourcentage par année20 dans les économies avancées, une tendance qui cadre avec la phase de déploiement à grande échelle de Perez. 

Pour les décideurs, le tournant représente une fenêtre pour jeter les bases d’un âge d’or durable. L’harmonisation de la réglementation, de l’éducation et des infrastructures avec le nouveau paradigme technologique aide à étendre les avantages au-delà des adopteurs précoces. Perez a prévenu que l’incapacité de s’adapter risquait d’ancrer les inégalités et de prolonger la stagnation au terme de la frénésie. 

Transition largement axée sur les actifs 

Les mêmes sociétés autrefois prisées pour leur évolutivité à faible intensité de capital affectent maintenant de 20 % à 35 % de leur chiffre d’affaires5 au capital physique. La hausse de la dépréciation et la réduction des rachats d’actions reflètent ce changement structurel. Par le passé, les secteurs qui sont devenus à forte intensité de capital ont vu leurs rendements du capital diminuer et la compression des ratios de valorisation. 

Non-concordance de la duration 

La demande mondiale de l’IA devrait atteindre 200 gigawatts d’ici 2030, soit environ le triple de la capacité actuelle. Pour justifier les investissements requis, les revenus annuels des centres de données devraient passer de 20 milliards à environ 2 000 milliards de dollars américains, ce qui laisse un manque à gagner de 800 milliards de dollars américains3. Malgré les gains d’efficacité attendus, l’écart illustre à quel point les valorisations actuelles dépendent de sources de revenus non éprouvées. 

Concentration du marché et flambée des valorisations 

Les sept plus grandes sociétés américaines représentent maintenant plus du tiers de la capitalisation boursière du S&P 500. Capital Economics souligne que seulement environ un quart des sociétés du S&P 500 ont surpassé l’indice cette année, soit la domination la plus concentrée depuis des décennies, ce qui renforce l’argument selon lequel l’ampleur du marché est aussi ténue que lors des bulles. Ils décrivent les conditions actuelles comme une « bulle qui commence à gonfler, mais qui ne devrait pas éclater avant des années », soutenues par une véritable promesse technologique et des flux de capitaux concentrés. 

Goulots d’étranglement dans les secteurs de l’énergie et des infrastructures 

Les centres de données optimisés par l’IA sont exceptionnellement énergivores. D’ici la fin de la décennie, leur demande d’électricité pourrait rivaliser avec celle du Japon13. Les services d’intérêt public nous mettent déjà en garde contre les contraintes des réseaux et la hausse des coûts. La pression physique sur les systèmes électriques reflète les pressions financières sur les bilans, deux symptômes d’un cycle d’investissement qui s’éternise. 

Leçons pour les portefeuilles canadiens 

Les investisseurs canadiens sont indirectement exposés à ce cycle en raison de la dépendance structurelle aux mégacapitalisations américaines. Pour avoir accès à l’innovation, les portefeuilles nationaux se sont concentrés dans le même ensemble restreint de chefs de file de la croissance mondiale, ce qui a pour effet d’importer le risque lié au bilan américain. 

L’IA devrait renforcer la domination de l’économie américaine et creuser les écarts de productivité entre les régions. Pour le Canada, cette concentration de la capacité technologique et de la capitalisation boursière accroît sa dépendance à l’élan économique des États-Unis et son exposition à ses possibles corrections. 

Cela reflète la dépendance commerciale du Canada en regard des États-Unis : lorsqu’une contrepartie domine les résultats, la souplesse s’érode. Si le complexe de l’IA fait face à des difficultés, les portefeuilles canadiens évolueront en parallèle. Le défi consiste à gérer cette corrélation, sans abandonner le thème. 

Qu’est-ce que les conseillers se feront demander 

L’IA est-elle une bulle? 

Selon Owen Lamont, une bulle est une hausse autosuffisante des prix au fil du temps, qui se traduit par des opérations spéculatives sur un actif manifestement survalorisé7. Trois conditions sont requises : 

Survalorisation – les prix sont généralement reconnus comme excessifs; 

Boucle de rétroaction – la hausse des prix attire de nouveaux participants et amplifie les récits optimistes; 

Négociation spéculative – les investisseurs achètent sciemment des actifs survalorisés en s’attendant à les revendre à des prix plus élevés. 

Selon cette définition, le cycle de l’IA n’est pas encore entré dans une bulle entièrement formée, mais il présente manifestement les deux premiers éléments. Les valorisations sont excessives et les boucles de rétroaction sont évidentes : les dépenses des sociétés suscitent l’enthousiasme, l’enthousiasme stimule les prix, et la hausse des prix justifie encore plus de dépenses, et la rhétorique des dirigeants renforce cette rétroaction. Lorsque les leaders du secteur déclarent qu’ils sont « prêts à déclarer faillite plutôt que de perdre cette course » ou que le risque de sous-investissement l’emporte sur le gaspillage de « milliards de dollars maladroitement investis », l’exubérance s’est manifestement propagée des marchés aux conseils d’administration. 

L’ère de la bulle technologique offre un parallèle utile. Lorsque les investissements nominaux dans les technologies de l’information et des communications (TIC) se sont effondrés après 2001, les investissements réels n’ont que légèrement reculé, car la baisse des coûts de l’équipement a entraîné la formation de capital. Si le passé ressurgit, une correction future de l’IA devrait toucher les valorisations boursières beaucoup plus que l’activité économique réelle. 

Un boom spéculatif financé par les flux de trésorerie peut s’éroder et avoir des répercussions macroéconomiques limitées, comme ce fut le cas après l’éclatement de la bulle technologique, lorsque les pertes étaient largement confinées aux actionnaires. Toutefois, un boom financé par des emprunts crée des passifs qui se propagent dans le système financier, transformant une correction de valorisation en un événement économique. Cette distinction déterminera si ce cycle-ci de l’IA se terminera par une correction du marché ou une contraction généralisée. 

Répercussions sur les portefeuilles 

À mon avis, la façon de gérer ces risques consiste à : 

• Maintenir l’exposition à l’IA et inclure des mandats qui s’étendent au-delà des constructeurs d’infrastructures pour inclure des bénéficiaires diversifiés. 

• Repérer les gestionnaires de portefeuille qui mettent l’accent sur la rigueur de la gestion du capital et la durabilité des flux de trésorerie disponibles comme critères de sélection clés. 

• Conserver les placements dans des stratégies non corrélées et alternatives comme une protection contre le risque de concentration. 

• Se rappeler le précédent historique : chaque innovation majeure a subi une correction avant de produire des rendements durables. 

• Je crois que le fait de participer à la correction, et non de l’éviter, est la voie du succès à long terme. 

Conclusion 

Mackay a écrit que les « gens deviennent fous collectivement, mais qu’ils retrouvent leurs sens individuellement10 ». Comme Shiller l’a souligné plus tard, les récits spéculatifs s’effondrent rarement du jour au lendemain; ils s’érodent à mesure que les investisseurs alignent leurs convictions sur la réalité. 

Cette fois-ci, la reprise prendra la forme d’une réévaluation rigoureuse des valorisations après des années de croissance à tout prix. L’IA remodèlera la productivité au sein des secteurs, mais son cycle financier suivra le même rythme humain que chaque innovation passée : excès de confiance, excès, correction et renouvellement. 

Comme Perez nous le rappelle, le véritable test de toute révolution technologique ne réside pas dans la frénésie qu’elle soulève, mais dans son déploiement. Le défi pour les investisseurs et les décideurs consiste à s’assurer que le boom de l’IA passe à un véritable âge d’or, où le capital et l’innovation se renforcent plutôt que de s’épuiser. L’histoire montre que des gains de productivité durables dépendront du maintien de la rigueur entre l’ambition financière et la capacité d’investissement réelle. 

Corrado Tiralongo (il/lui) 

Vice-président, Répartition de l’actif et chef des placements  

Gestion de placements Canada Vie limitée 

 

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Notes et références   

1. Capital Economics (31 octobre 2025). Capital Daily – « What to make of the mixed reaction to this week’s big-tech results ». 

Observations sur les bénéfices des sociétés américaines de très grande envergure pour le troisième trimestre de 2025 : hausse des dépenses en capital malgré la forte croissance des bénéfices; dépendance accrue à l’égard de la location, des instruments spécialisés et du financement par emprunt. 

2. McKinsey & Company (2025). The Cost of Compute: A $7 Trillion Race to Scale Data Centres. 

Prévoit des investissements mondiaux dans les centres de données liés à l’IA compris entre 5 200 milliards de dollars américains (scénario de base) et 7 900 milliards de dollars américains (scénario accéléré) d’ici 2030; environ 60 % en matériel, 25 % en infrastructures énergétiques et 15 % en construction et terrains. 

3. Bain & Company (2025). 6th Annual Global Technology Report – « $2 Trillion in New Revenue Needed to Fund AI’s Scaling Trend ». 

Estime que la demande mondiale de l’IA atteindra 200 GW d’ici 2030, les dépenses en capital annuelles, 500 milliards de dollars américains et les revenus annuels nécessaires à une évolution rentable, 2 000 milliards de dollars américains; établit un manque à gagner de 800 milliards de dollars américains de revenus selon les prévisions actuelles. 

4. J.P. Morgan Asset Management – Michael Cembalest (septembre 2025). The Blob. 

Les actions liées à l’IA ont contribué à environ 75 % des rendements du S&P 500, à 80 % de la croissance des bénéfices et à 90 % de la croissance des dépenses en capital depuis la fin de 2022; souligne les pressions croissantes sur les émissions de titres de créance et le financement des sociétés de très grande envergure. 

5. Edward Chancellor (2016). Capital Returns: Investing Through the Capital Cycle. Palgrave Macmillan. 

Démontre que les secteurs dont la croissance de l’actif est la plus rapide ont par la suite inscrit des rendements inférieurs à ceux dont la croissance est plus lente; décrit le « piège du cycle du capital », où des investissements abondants précèdent une baisse des rendements. 

6. William Quinn et John Turner (2020). Boom and Bust: A Global History of Financial Bubbles. Cambridge University Press. 

Les parallèles historiques entre les bulles ferroviaire, radiophonique et Internet; documente les investissements excessifs dans les télécommunications et Internet de plus de 500 milliards de dollars américains dans les années 1990. 

7. Owen A. Lamont (2024). « No, We Are Not in a Bubble (Yet) », Acadian Asset Management. 

Définit une bulle comme « une hausse autosuffisante des prix au fil du temps, qui se traduit par des opérations spéculatives sur un actif manifestement survalorisé », qui requiert trois ingrédients : survalorisation, boucles de rétroaction et négociation spéculative. 

8. Owen A. Lamont (octobre 2025). « Is the U.S. Stock Market in a Bubble? » Acadian Asset Management. 

Présente l’« alpha idiot enthousiaste » – des périodes où les investisseurs individuels surpassent les professionnels en signe d’excès de spéculation; cite le solide rendement des FNB populaires auprès des investisseurs individuels, comme le SoFi Social 50 (SFYF) et le Samsung KODEX Investor Choice (473460). 

9. Robert Shiller (2005). Irrational Exuberance, 2nd Edition. Princeton University Press. 

Discute des boucles de rétroaction, de la contagion narrative et de la façon dont les épisodes spéculatifs ressemblent à des « combines à la Ponzi naturelles » alimentées par l’amplification des médias et l’imitation sociale. 

10. Charles Mackay (1852). Memoirs of Extraordinary Popular Delusions and the Madness of Crowds. London: R. Bentley. 

Source de la citation : « Les gens deviennent fous collectivement, mais retrouvent leurs sens individuellement. » 

11. Charles Kindleberger et Robert Aliber (2023). Manias, Panics, and Crashes: A History of Financial Crises, 8th Edition. Palgrave Macmillan. 

Définit les étapes séquentielles des bulles financières : déplacement → boom → euphorie → détresse → révulsion. 

12. Edwin Lefèvre (1923). Reminiscences of a Stock Operator (Mémoires d’un spéculateur). George H. Doran Company. 

Source de la citation : « Le public fait de l’argent qu’il perd plus tard simplement parce qu’il est resté trop longtemps dans le marché haussier. » 

13. International Energy Agency (IEA) (2025). Electricity Market Outlook 2025. 

Prévoit que la consommation mondiale d’électricité des centres de données atteindra 5 % à 6 % de la consommation mondiale totale d’électricité d’ici 2030, ce qui correspond à peu près à la demande actuelle du Japon. 

14. Bloomberg Intelligence (2025). AI Infrastructure Capex Tracker. 

Estime à 400 milliards de dollars américains les investissements mondiaux dans les infrastructures d’IA en 2025. 

15. Mark Zuckerberg, chef de la direction de Meta Platforms – cité sur mlq.ai, septembre 2025. « Si nous investissons maladroitement quelques centaines de milliards de dollars, je pense que ce sera très malheureux, de toute évidence. Mais je pense que le risque est plus élevé de ne pas investir. » 

16. Larry Page, cofondateur de Google/Alphabet – cité sur Barchart.com, octobre 2025. 

« Je suis prêt à déclarer faillite plutôt que de perdre cette course. » 

17. Sundar Pichai, chef de la direction d’Alphabet – cité lors du Forum économique mondial, janvier 2023.  « L’IA est plus puissante que le feu ou l’électricité. » 

18. Satya Nadella, chef de la direction de Microsoft – allocution lors de la conférence téléphonique sur les bénéfices de Microsoft pour l’exercice 2025, en juillet 2025. « Nous sommes dans la course pour bâtir l’infrastructure d’IA la plus puissante au monde et personne n’investira autant que nous. » 

19. Carlota Perez (2002). Technological Revolutions and Financial Capital: The Dynamics of Bubbles and Golden Ages. Edward Elgar Publishing. Présente le modèle à quatre phases (installation, frénésie, tournant, déploiement) utilisé pour décrire l’évolution des révolutions technologiques. 

20.  Capital Economics (novembre 2025). Global Economics Update – « How to think about AI investment ». Estime que les dépenses en capital liées à l’IA correspondent actuellement à 0,6 % du PIB des États-Unis (140 milliards de dollars américains) et qu’elles pourraient stimuler la croissance du PIB mondial de 0,3 % à 0,5 % par année jusqu’en 2027, avec des gains de productivité potentiels à long terme pouvant atteindre 1,5 point de pourcentage par année.